TW/CW transphobie, psychophobie, mort, violences médicales pour le passage sur mon psychiatre
Avant de commencer cet article sachez que je ne parlerais pas de comment j’ai découvert ma transidentité.
Ici on commence au moment de ma vie où je pense être un homme trans, j’ai donc 16 ans à l’époque et je suis encore dans le placard.
Maintenant que le contexte et la période sont posés on peut y aller. Donc comment mon état de santé physique et mental (et la transphobie et la psychophobie) m’ont empêché de transitionner.
À 16 ans je suis donc un bébé homme trans dans le placard. Mais je suis aussi une personne malade psychologiquement.
On ne sait pas ce que j’ai exactement mais j’ai tous les symptômes d’une dépression, des hallucinations, et des idées suicidaires.
J’ai commencé à être suivie par un psychiatre totalement incompétent et obsédé par l’idée de mettre un-e fol-le en cage.
Mes séances ont consisté à angoisser de me retrouver interné-e… Au bout de quelques mois j’ai décidé de lui parler de ce qui était à l’époque de la dysphorie et de ce que je ressentais.
Il a mis ça sur le compte de ma santé psy et d’un TDI. Oui vous lisez bien, pour lui je ne pouvais pas être trans c’était forcément un trouble de l’identité qui m’induisait en erreur.
Je vous mentirai si je vous disais que j’en ai pas un léger. Son diagnostique était à la fois faux et à la fois juste, basé sur du vent mais juste par miracle.
Il a été confirmé par un autre psy mais cette fois basé sur de réels symptômes et pas de la transphobie.
Entre ma première tentative de parler de ma transidentité et ma prise en charge psy correcte il s’est passé plusieurs mois puis années.
Enfin à partir du moment où j’étais bien suivi-e, par un bon psy, je pensais que j’allais pouvoir commencer ma transition en tant que personne non binaire.
Et oui j’ai eu du temps pour me poser des question et surtout j’ai appris l’existence de la non binarité.
Je vous passe les détails mais ça a tout de suite fait sens face à mon vécu et mon ressenti quand j’ai lu le témoignage de personnes agenres.
Mon besoin était surtout de transitionner vers un corps considéré comme neutre.
Bon j’allais quand même devoir me faire passer pour un homme trans parce qu’on m’a bien fait comprendre que les médecins ne reconnaissent pas autre chose que homme trans ou femme trans. La joie de l’enbyphobie hein. Mais voilà, on y était.
Et donc j’ai 19 ans et je suis prêt-e à commencer ma transition médicale. Olala qu’est-ce que c’était long d’attendre, j’étais hyper excité-e que ça arrive enfin !… Haha…
Entre temps j’ai une patho physique inconnue qui s’est réveillée. Vous sentez venir les emmerdes ? Parce que moi innocemment à l’époque pas du tout.
Il s’est avéré que je réagis très mal aux hormones. Toutes. Je ne peux donc prendre aucune contraception hormonale et plus important, je ne peux pas prendre de Testostérone.
Disons que le risque c’est un œdème pulmonaire ou un choc anaphylactique, au choix.
Donc on a abandonné cette option.
La suite logique ça aurait été la mammectomie. C’était une des autres choses que je ne supportais pas, mes seins. Y a pas moins neutre que ça à mes yeux. Finalement après en avoir discuté avec mes soignants on est arrivé à la conclusion que je pouvais pas.
Ma cicatrisation est extrêmement mauvaise, mon système immunitaire absent, et au vu de comment s’étaient déroulées mes précédentes opérations quand j’étais en meilleure santé, on ne tenterait pas.
Vous savez les médecins ne veulent pas m’opérer pour des choses comme une malformation de la rotule, alors une mammectomie, mdr, c’était en dernier sur leur liste.
J’aurai pu insister et me battre, j’aurai fini par l’avoir. Mais quand vous vous battez tous les matins, tous les jours pour rester en vie, juste survivre 24h, enlever vos seins et réduire votre dysphorie c’est pas une priorité.
Ma priorité c’était de rester en vie et cette opération c’était risquer de rompre mon fragile équilibre physique et ne plus arriver à survivre.
Et finalement avec tout ça on arrive à aujourd’hui. J’ai 21 ans et je n’ai pas transitionné. J’ai même abandonné l’idée d’une transition. J’irai jamais mieux, ça sera seulement pire de mois en mois.
Je dois déjà me battre pour avoir des soins, pour l’accessibilité, pour mes droits en tant que personne handi et malade, pour ceux de mes adelphes trans, pour étudier, pour travailler.
Je me suis résigné-e et j’ai accepté la frustration et la douleur d’être vu et considéré-e comme une femme cis toute ma vie. J’ai aussi accepté mon corps, il est déjà malade, difforme et abîmé, je suis plus à ça prêt. Il est là et il continue de fonctionner un peu et je m’en contente. J’ai appris à l’accepter grâce ou à cause de ma maladie.
Il reste la transition sociale à aborder. J’en ai une, mais elle est très sélective et restreinte.
En fait je suis out seulement dans mon mini oasis : auprès de mes ami-e-s très proches et dans les milieux virtuels anonymes. Pour la simple raison que actuellement m’outer à mes soignants c’est prendre le risque d’être mal soigné-e, de devoir en changer.
Et quand vous avez une maladie qui nécessite de faire 400km pour trouver UN médecin compétent, je vous laisse imaginer si il devait être compétent et transfriendly.
Pour ce qui est boulot et autre c’est aussi prendre le risque d’être exposé-e à la transphobie et de la discrimination. J’en subis déjà assez en étant handi et en demandant des aménagements de poste, si je m’en rajoute je suis pas certain-e d’arriver à y survivre. Autant psychologiquement que financièrement.
C’est donc naturellement que j’ai aussi renoncer à une transition administrative.
En fait pour moi, être trans ouvertement et officiellement c’est risquer de ne plus avoir d’accès à mes soins vitaux, de ne plus du tout pouvoir travailler et de ne pas pouvoir vivre.
J’ai dû choisir entre survivre malade et perçu-e femme ou bien être moi, une personne trans mais morte dans quelques mois/années par manque de soin et d’argent.
Et j’ai choisi que je voulais vivre même si je devais renoncer à être qui je suis pour ça. Mes ami-e-s et internet c’est le seul moment où je peux arrêter de me cacher et de mentir.
Ça semble être une veille phrase qu’on aurait pu dire y a 50 ans.
Mais pour moi elle est toujours d’actualité et elle m’accompagnera toute ma vie.